Vol vers Bangkok

Pluie à Nice.
Longue attente à Frankfort, entre deux vols. Bière allemande… Le vin rouge allemand est un poil au dessus du vin malgache. Particulier.
Passage à la douane tatillon, fouille et déshabillage partiel. On a échappé à la fouille anale. De peu. Chaussures emmenées pour examen approfondi.
Lune qui se lève orangée sous l’aile de l’avion qui pointe est-sud-est.
On passe au dessus de Bayreuth, Klatovy, Stratonice, Jrindrichuv Hradec, Vlasim, Ceske, entre Vienne et Brno, entre Budapest et Banska Bistrica. La lune monte dans le ciel, nous accompagne, va nous accompagner tout le voyage, déesse protectrice ou tutélaire… La campagne slovaque est noire. Roumanie, Oradea, on attaque la mer noire au nord de Mangalia.
On mange mal, trop sucré, un fromage qui a la forme du camembert en portion, mais qui ne ressemble à rien, gâteau estouffe… Mais on boit sec, apéritifs, vin à volonté et digestif aussi. On boit du Cognac et on préserve la ressource en eau. Le personnel est sympa, et francophone.
Tosya, Kastamonu, Corum, Elazig, Euphrat river, Murat river… moi dodo.
Apres 7h de vol, toujours la nuit, Bikaner, l’Inde. Lakhnau…

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Et puis, le jour levé, la chaine de l’Himalaya au dessus d’un ocean de nuages. Mal dormi au final. Petit dej’ dans l’avion dégueulasse, oeufs brouillés pommes de terre et chou bouilli. Khatmandou, Calcutta, Bagan et Bangkok.
Bangkok, chaleur moite, 31°au thermomètre. Taxi très vite. En ville. Toujours beaucoup de circulation. On passe devant le palais du roi, avec sa photo en devanture. En face, une caserne de l’armée, un bureau de police et encoure une caserne de l’armée. Et ça continue sur des kilomètres.
Il est juste dix heures du matin en France, 16h ici.

Après l’orage

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Après l’orage,
le soleil est revenu…
Bien tard, juste avant de se coucher.
Les voisins des toits en sont tout excités.
Une tension vers je ne sais où.
Nous allons faire comme eux,
Nous envoler vers des cieux plus généreux…

Après-midi d’automne

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V’là l’hiver qu’arrive, semble-t-il…
L’automne poussé.
Poussé là où l’printemps s’en est allé rejoindre l’été.
Déjà.
Une après-midi de novembre, petit port de Boulouris.

C’est la rentrée

Orage de fin d’été.

Après midi de septembre.

Rue de la République, les épiceries sont fermées, les pavés déserts. Les touristes s’en sont allés. La jeunesse aussi. Sur le port, des couples âgés vont, viennent, beaucoup d’étrangers. Qu’est-ce qu’ils recherchent ? Des pièges à touristes, sans doute. Les plus vieux les regardent passer.

2013-09-08_17.52.49-090fcIl fait lourd, moite. Dans la rue commerçante, les mannequins enfermés derrière les vitrines me regardent, moroses. Bonnets, chaussures, pulls sombres, ils ont leurs vêtements d’hiver. Sale boulot. Je marche, sandales, short, teeshirt.

Deux jeunes italiennes photographient la basilique, tellement chic, tellement pâtissière, avec ses dômes, ses murs de porphyre rouge, son archange doré. Jésus parle aux enfants, annonce la banderole au-dessus du porche.

Rue Waldeck Rousseau, un petit bonhomme tout sec, Heineken dans une main. Il hésite, ramasse deux mégots, les range dans une poche. Il croise une momie cossue, trompée par le soleil. Elle a tenté la plage, matelas et parasol.

Devant la mairie, deux chiens discutent, la queue en l’air. Au bout de leur laisse, les maîtres font de même. Ils causent chien justement …mordu par un Jack, j’entends. Sur la porte du local UMP, une affichette : report de la réunion mensuelle “Action féminine” pour cause de conseil municipal…

C’est vraiment la rentrée…

Le train bleu

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Gare de Nice.
Elle est seule.
Où va-t-elle ?

U-M-Péthon

Depuis quelques mois, j’habite à deux pas de l’église San Rafeù, la vieille église du XIIème siècle, celle dite des Templiers. Dans le voisinage se trouve aussi le local de l’UMP, dans la rue pavée qui longe le marché République. Je suis donc amené à passer devant ce local quotidiennement.

titisan_rafeu-20cdfPresque tous les soirs, à la fraiche, des réunions s’y tiennent. Habituellement, quelques personnes écoutent ou discutent. Je n’entends que rarement plus d’un mot ou deux en passant. Mais cette fois, il y avait foule, les chaises étaient sorties sur le pavé, la petite pièce ne suffisant pas. Et l’orateur parlait fort, pour être entendu de tous.

Il était question de l’U-M-Péthon. Vous savez, Sarkozy, l’ancien président, celui qui a perdu toutes les élections depuis 2007, celui qui a ruiné la France, celui qui est venu faire la quête auprès des français pour sauver le parti qu’il a aussi ruiné. Oh, rien de polémique là-dedans, j’en ai autant pour son successeur, qui, par aveuglement, conduit la France vers l’abîme que creuse avec aplomb la Marine, laquelle espère profiter de nos restes.

Mais je m’égare. L’orateur était en train de se féliciter que la cinquième circonscription du Var, la mienne, ait, en une semaine, récolté 8000€. C’est peu, pour une des circonscriptions qui compte le plus d’imposés sur la fortune de France, mais bon, les riches sont radins, c’est bien connu…

Et le voilà qui en rajoute, qui précise qu’il s’agit de la cinquième circonscription élargie, que des sympathisants extérieurs auraient également donné leur obole. Et même une famille venue du Morbihan, dis-donc !

Au cas où cette rumeur viendrait à vos oreilles, je tiens à préciser que, bien qu’originaire de Bretagne, je ne suis pas le généreux donateur morbihanais qui a financé l’UMP à Saint Raphaël. Dame non.

Mouroir

20 juillet, c’est l’été, normal. Impression de vivre dans un village, la convivialité, les bruits, le calme, tout ça. Et pourtant, derrière les toits, la ville.Il fait beau, c’est l’été, c’est normal.

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Cet immeuble, on y vit au dernier étage. Deux portes sur le palier, un couple de retraités souriants, et nous. En dessous, des appartements silencieux. Vides ou habités. Beaucoup de personnes âgées. Un couple plus jeune, un peintre, mais aussi un jeune homme et sa compagne enceinte. Ceux-là ne resteront sans doute pas dans leur deux pièces exigu.Il y a aussi cette jeune femme, propriétaire à vingt-cinq ans. Merci papa.

Un immeuble à l’image de la ville. Ici, la population de seniors a dépassé celle de Menton, faisant de Saint-Raphaël la ville la plus vieille de France. Pourtant le maire, sans doute touché par un début de gâtisme, s’est récemment réjoui du rajeunissement de la cité. On lui aura mal expliqué, certainement. Un immeuble de vieux, pour dit le mot qui convient. Comme il se doit calme, endormi. Trop quelquefois.

Ce matin, un mot, dans l’ascenseur, pour l’achat d’une couronne. M. S… est décédé. J’en parlais avec Mme P…, qui gère les garages, les jardinières et les clés des résidents. Je ne connais pas ce monsieur S… je ne l’ai jamais croisé. J’essaie des mots maladroits, pour exprimer mes condoléances. C’est qu’elle a l’air touchée, Mme P… alors j’ai dit que c’était inévitable, à un certain âge.

Elle a eu un regard. Il avait soixante ans, elle a ajouté.

Diable…

Drôle de voyage

Pour une fois, rien n’était planifié. Arrivé à 15h00 à Épinal, il fallait trouver un moyen de rentrer à Saint Raphaël avant lundi matin. Hasard des rencontres, ce sera en camion, départ le soir même.

On est passé par Vesoul. De nuit, des lumières, des rues vides. Des zones commerciales désertes. Un peu de vie dans un village voisin. Un bar illuminé à la terrasse déserte.

Mal dormi du côté de Lyon, sur une aire d’autoroute. Il fait froid, la banquette est inconfortable. Petit matin même endroit. Des visages hagards. Café, croissant. On the road…

2013-08-31_07.12.57-24702Arrivé à Grenoble avec le soleil.

Et puis la route Napoléon, Sisteron, Entrevaux, jolis villages qu’à trop voyager loin, j’avais oubliés.

Sur la route, donc, avec un vieux couple charmant, passant sans cesse de la tendresse aux chamailleries. Un barbu philosophe, une dame pleine d’humour, tout en finesse. Des personnes attachantes. Après une première vie en Artois, ils ont planté leurs racines au bord du Cians. En ont fait leur paradis. Je les envie en silence.

Nice enfin. Ils me laissent à la gare de Saint Augustin.

Là, mauvaise surprise, deux heures à attendre le prochain train. Du monde sur les quais, des américains qui viennent de l’aéroport tout proche, des groupes de jeunes.

Un ado marocain avec deux casques s’assoie à côté de moi. Il m’explique qu’il va à Grasse récupérer un copain qui a “trouvé” un scooter. Il interpelle sa grande soeur, de l’autre côté des voies, qui va faire des courses en ville, tente de me taper une clope.

Et puis deux jeunes filles, 14 ans peut-être, maigrichonnes, complètement hystériques, qui parlent un mélange d’arabe et de français, langage de la cité, du “14 de La Madeleine”. Le gamin est du 21. Échange de noms… “Je connais Mehdi au 21… je connais Tony, un grand… celui qui a une Golf 4…” L’une fume un joint, s’assoie près de moi, me demande si la fumée ne me dérange pas. Et puis elles discutent, des dealers, de la bac, des schmitts, de leur dernière garde à vue. Elles sont de plus en plus énervées, l’une d’elle essaie de rouler un nouveau joint, mais n’y arrive pas. Elle me demande si je sais le faire, si je peux le lui faire. Et ben devine… j’ai réussi.

Elles vont à Avignon. Une jeune femme les remplace, s’assoie à côté de moi, me demande en espagnol à quelle heure est le train. Je lui réponds en italien, et puis elle commence à discuter avec moi, envoie son mec, tatoué, acheter un orangina, m’explique qu’elle est gitane espagnole, qu’elle vit à Nice. Elle cause avec moi pendant une vingtaine de minutes. Quand je lui parle de Nina, elle rigole. “Alora sei nonno”. Et elle me dit qu’elle a elle aussi deux enfants, se tait. Et puis Ciao, un sourire, nos routes se séparent. Je monte dans le premier wagon pour être tranquille.

À Antibes, c’est une espèce de pouffe qui s’assoie à côté de moi. Sexy mais bizarre. Balèze, la blonde, les lèvres gonflées au botox, des seins en avant, des sous-vêtements de dentelle violette, une mini-robe moulante blanche, le tout couvert de bijoux. Elle a un petit chien contre elle, un de ces bichons stupides à noeud papillon. Elle minaude avec lui. En anglais. Mais il y a un truc bizarre… Quand elle parle à sa copine, la brune, elle a une grosse voix d’homme.

Pour finir ce voyage, à Anthéor, le train tombera en panne. Une porte ne ferme plus, et il faudra une bonne demi-heure avant qu’il ne reparte. Le haut-parleur grésille, en panne depuis longtemps. Personne ne parle. Un choc. La rame hoquette, repart.

Arrivé. Il y a du monde à la gare. Un groupe de jeunes filles plutôt chic. Elles discutent. Pas le même monde. Il s’en passe des choses, quand on sort…

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Sur la photo, ils ont tous les deux l’air perdu.

Il devait avoir dix-sept ans, il en paraît tout juste treize. L’autre, d’un an plus vieux, est à peine un adulte. Il le domine, le protège peut-être. D’ailleurs, c’est lui qui sourit. Mon père se raccroche à son épaule. Derrière un palmier. Rien d’autre.

Une photo prise pour donner des nouvelles à la famille. Elle est datée. Charles et Roger, peut-on lire au dos, 1940 Casablanca.

C’est une photo qui ne se trouve pas dans les albums de famille, une photo qui m’a toujours intriguée. Le plus jeune des deux, c’est Roger, mon père, et le grand frère, mon parrain, Charlot.

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Pourquoi cette photo aujourd’hui ? Roger est mort il y a trente ans, et je reviens des obsèques de son frère Charles. Leurs voix se sont maintenant tues. Curieusement, au delà des différences physiques, c’était la même voix. Le même timbre, les mêmes intonnations, les mêmes expressions.

Et puis, cette photo, elle raconte une histoire.

Que faisaient deux jeunes Bellilois de 17 et 18 ans à Casablance à Casablanca en août 1940 ?

Et ça, ce n’est pas une petite histoire, c’est la grande histoire, mais toute nue…

Une photographie (2)

J’appartiens à une génération où la guerre était encore présente. Mes instituteurs avaient bien sûr été résistants, les hommes politiques, les journalistes, les diplomates, les dirigeants d’entreprise, tous avaient leur diplôme de bonne conduite pendant l’occupation. La France du Général de Gaulle avait massivement résisté à l’envahisseur.

Et rituellement, tous les ans, la commémoration de l’appel du 18 juin venait nous le rappeler. Avec en point d’orgue, la célébration du courage, du patriotisme des hommes de l’île de Sein, tous volontaires pour rejoindre Londres.

Et tout aussi rituellement, mon père riait, parlait de mensonge. Du mensonge sur le ralliement de tous ces hommes. Il racontait l’histoire du commandement militaire des îles du Ponant, qui avait mobilisé les hommes et les avait embarqué d’autorité pour Londres.

Le bateau qui embarquait les groisillons aurait été torpillé devant Lorient. Et le commandant de celui qui transportait les bellilois aurait décidé de rejoindre le Maroc plutôt que l’Angleterre, pour y rejoindre sa famille.

Ça, bien sûr, c’est l’histoire de la photo, le pourquoi de la présence des deux frères à Casablanca, en août 40. Restent malgré tout ces propos, que j’attribuais à son anti-gaullisme. C’était tellement en opposition avec la doxa de l’époque, l’héroisme des îliens bretons, impossible à nier.

Et pourtant, en cherchant, j’ai trouvé. Le nom du bateau, le San Pedro. Le récit d’un écclésiastique, et surtout un carnet de voyage, celui d’un soldat français, embarqué sur le bateau à Cherbourg, qui parle de l’embarquement des bellilois, et des circonstances de ce voyage au Maroc. un petit carnet rouge.

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Cela n’enlève rien au courage de ces Sénans de la France libre, mais rappelle juste que les circonstances sont souvent plus fortes que les hommes. Voilà ce que j’ai pu reconstituer cette aventure qui a amené les deux frères au Maroc…