en lané 1811

Ce soir, où que se porte mon regard, je vois des murs, une maison, je ne dirais pas sans âme, j’y habite, mais sans passé, tout au plus un demi-siècle. Une famille y a vécu, l’été. C’est tout. Elle sera détruite, dans un an, dans deux ans. Tout y est en sursis. Une maison morte avant d’avoir vécu. Il n’en restera rien.
Contraste avec cette semaine passée dans la Vosge. Une maison de grès, une maison paysanne. Sur le linteau, cette inscription : “en lané 1811“.

titi-linteau

Penser qu’une maison puisse avoir cet âge, qu’elle puisse être habitée, que j’y ai dormi… Combien de vies, combien de rires, de drames, combien d’amour s’y ont déroulés. Elle a survécu aux guerres de Napoléon, à la guerre de 1870, celle de 14 et celle de 39, et elle est toujours là.
Ces lieux habités, ces traces d’un passé révolu me fascinent, me racontent des histoires. Ces murs ont vibré aux bruits de vies qu’ils ont abritées. Est-ce que j’aurais pu être medium dans une autre vie ?
C’est un village assez hors du temps, c’est vrai. Et c’est le hasard qui m’a conduit ici. C’est sûrement un pays de sortilèges, de sorcières et de guérisseurs. Quand j’écris, ce matin-là, du bruit, dehors, un voisin qui fend du bois pour l’hiver. Toutes les maisons ont toutes un de leurs murs couvert de bûches, stock de bois de chauffage. A Ronan, on a dit quatre mois de neige et de verglas, au minimum…

le-hameau-de-la-grande-fosse-commune-des-voivres

J’aimerais que ce village me retienne, que la voiture refuse de repartir, village d’un autre temps. Même pas peur. La proprio habite en face de la maison, elle est née à cinquante mètres d’ici, a vécu dans la maison du virage, un peu plus haut sur la côte. Sa famille a bâti la chapelle. Son père, son grand-père sont d’ici… Sorcière? Gentille en tout cas, souriante.