La consultation

Dans la salle d’attente, immense, un hall de gare, une infirmière entre, prend la parole, voix haut perchée, Cerbère incarné.
– Tout le monde est-il passé à l’accueil?
Une dame se lève, celle qui n’avait ni carte vitale, ni attestation de domicile.
– Vous auriez pu y passer la journée ! On allait pas deviner que vous étiez là, quand même ! Et puis on m’écoute, on est attentif, on se tait ! Vous, là bas, on ne téléphone pas quand j’explique. J’ai de la mémoire, il ne faudra pas venir me poser des questions, tout à l’heure !
On nous appelle par des hauts-parleurs. ” Ma’ame Michu, box 27 ”
Un couple de très vieilles personnes demande de l’aide, ils sont presque sourds. ” Allez donc vous asseoir sous les hauts-parleurs! On ne peut pas faire de miracle, tout de même ! ” Ils se placent près de nous, nous demandent de les prévenir si leur nom…
C’est une vraie prof, cette infirmière, pédagogique, organisée. Le service ne tourne que grace à sa présence. Des affichettes, à l’accueil, rappellent quelles condamnations on encourt si on insulte le personnel. Ambiance…

” M’sieur Le Berre, box 19 ”
Consultation rapide, efficace. Un traitement.
Problème, le traitement, un champignon en collyre, n’est délivré – et fabriqué – uniquement au XV-XX. Il se conserve au frais -moins de 8°- et peut être expédié en province, à mes frais, mais pas dans les DOM. Le médecin m’a prescrit un mois de traitement, à voir pour la suite avec mon ophtalmo, qui ne pourra pas me fournir le traitement.

Ubu still alive…

Les deux petits vieux ont disparu, sans doute ont-ils trouvé leur box.
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Midi, retour dans le marais, restaurant végétarien… délicieux.
Un régal, des plats pleins de couleurs et d’invention, un nom pour le moins curieux, La victoire du coeur suprême, une adresse médiévale, rue du Bourg Tibourg.

Hôpital des Quinze-Vingt

Les caisses ouvrent en retard, une queue s’est formée. Un type passe devant tout le monde, en disant moi, c’est une urgence, ma voisine a oublié sa preuve de domiciliation, elle n’a pas sa carte vitale non plus, mais elle a rendez-vous depuis des mois.

Je descends au sous-sol pour mon OCT – imagerie de l’œil – où il n’y a personne. Des secrétaires arrivent, s’enferment. Un petit homme range des dossiers dans un caddy de supermarché.
On s’assoie dans le couloir. Un ordre tombe :
– Vous déposez les convocations ici et vous vous asseyez là.
– Mais ceux qui sont arrivés les premiers passent les derniers, alors?

Je précise à la secrétaire que j’ai une autre convocation, pour une consultation, qu’il faut téléphoner à l’étage pour dire que je suis là, au sous-sol
– Oui, je comprends, mais moi, je ne téléphone pas. Montez le leur dire.
La secrétaire met une deuxième boîte convocation. Question, où met-on nos convocations ?
– Dans la boîte #1, et puis restez assis.

Je monte, on prend note, je suis à l’OCT, mais il faut demander à passer en premier, le docteur de la consultation part en vacances à 10h30.
J’explique, à l’OCT. Je me fais jeter. L’infirmière n’est pas là. Le médecin n’est pas encore arrivé. On me dit de m’asseoir ou de partir à la consultation. La vieille dame qui a peur que je ne lui passe devant va aux toilettes. Elles sont fermées.
– Normal, c’est occupé par le monsieur qui vient de passer, dit la secrétaire.
– Mais il y a une autre porte !
– C’est celle du personnel, madame. Asseyez-vous, en attendant.

Arrive une infirmière, débauchée d’un service à l’étage, qui râle – Ça va gueuler, là-haut ! – qui nous met des gouttes dans les yeux, en espérant la venue d’un médecin.
Et le médecin, enfin. Une gentille dame, qi m’explique qu’elle ne fait que des OCT de la pupille, qu’il me faut un OCT de la cornée, que le spécialiste est en vacances, que l’examen qu’elle va me faire ne sert à rien, mais puisque je suis là…
Résultat, ma pupille est nickel. Normal, elle n’a rien.

Mon canapé à moi

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C’est mon nid, mon bureau, ma bibliothèque, mon petit coin d’hiver, mon refuge des jours d’orage, le dernier rempart de ma liberté.

C’est le printemps

Aujourd’hui cela sent le printemps.
Il fait plus doux, on commence à manger dehors, sous la varangue.
Les élèves sont rentrés, maintenant cela tourne.
Mais surtout le jardin embaume la maison.
Surtout le jasmin qui a une odeur entêtante, très puissante. Dommage qu’il ne soit pas possible de la mettre en pièce jointe.

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Heureusement, ce matin, en nettoyant un peu les feuilles tombées, j’ai vu que le pamplemoussier était en fleurs, odeur très douce là. Voilà donc des grappes de fleurs qui donneront des pamplemousses immangeables, mais délicieux en gelée ou en confiture (il en reste deux pots !).

Et puis l’ananas est en fleur, les mangues commencent à ressembler à des mangues.

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Vivement l’été, donc, que l’on se régale, jus de mangue, rougails, salades de fruits, confitures et tartes Tatin à gogo.

Spam

Un petit message pour signaler notre nouvelle adresse électronique. Après la maison, Internet, et là ce n’est pas un choix. Après avoir conservé la même adresse pendant près de huit ans, je me vois aujourd’hui contraint d’en changer.

Celle-ci a été récupérée par un virus à l’époque où Orange s’appelait Wanadoo, et circule de plus en plus souvent comme vecteur de spam – j’en ai moi même reçu ! -, au point que mes messages sont de plus en plus souvent bloqués par les serveurs, y compris Orange, même lorsqu’ils ne proposent ni Rollex ni Viagra ni d’agrandir quoi que ce soit.

A propos de penis to enlarge, je joins l’image d’une racine aérienne de vacoa croisée ce midi dans le sud de l’île, un vrai spam, pour le coup.

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Pour ceux d’en haut, le vacoa, c’est une plante assez placide qui pousse en bord de mer à la Réunion.

De retour

On a déménagé avant de partir, tout posé un peu partout, et tout oublié illico. Une heure, il nous a fallu, pour retrouver les clés des portes fenêtres, beaucoup de perte de temps dans la cuisine, bouteille de gaz qui rend son dernier souffle, ordinateur en rade (besoin d’alcool isopropylique !), bref, du boulot pour le week-end…
Des rumeurs bruissent, des courriers tombent, désagréables : progressions, pré rentrée prochaine, mais tout cela reste à confirmer, et même pas trouvé mon cartable.
Mais enfin, voilà ceux qu’on a quitté .

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Et voilà celle qui nous accueille.

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Et il faudrait travailler?

Some news

Dernière ligne droite avant le déménagement…
Comme d’hab’, maintenant que l’on quitte la maison, on n’en voit plus que les défauts.
Sans cachet, froide, bruyante, pas de jardin, sur la route…
Toutes les raisons qui nous avaient alors fait choisir cette case-ci (neuve, agréable, pas d’entretien, proche des commodités, comme on dit).
Bref, on sort autant qu’on peut pour ne pas y rester.
Aujourd’hui encore dans le sud, où il y avait de belles vagues, et même du soleil.

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On s’est promené au bord de l’océan, près du Cap Méchant, un endroit sinistre, une langue de lave noire qui résiste au fracas des vagues.

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Dos à la mer, Anne-Marie n’a pas vu la vague qui explose derrière elle…
Va-t-elle bientôt être trempée?

Découragé

Petit bilan après trois jours de correction du concours PE.
Cette année c’est l’histoire et la géographie, 118 copies corrigées, plus de huit cents notes saisies. Il y avait beaucoup d’absents dans notre paquet.
Avec quelques perles bien sûr. Pourtant les sujets étaient très classiques, les grands axes de communication en France métropolitaine et le siècle des Lumières pour l’histoire.

On a eu beaucoup de monde, de Léonard de Vinci à Emile Zola. Quelques exemples :
Le plus sérieux, Emile Rousseau a publié en 1742 le code Rousseau.
Le plus innovant, Napoléon élu au suffrage universel indirect, les frères Lumières, inévitables et inoubliables – sic – inventeurs de l’électricité. Ils ont laissé leur nom au siècle.
Le plus énigmatique, c’est le rôle moteur de la Ford T dans ce 18ième siècle où Pasteur inventa la vaccine et Flemming la bactérie tueuse de champignon.

Gastronomique aussi, la France étant le pays des fromages, c’est à Fourme d’Alembert qu’on doit l’Encyclopédie, premier dictionnaire avec illustrations, Gutemberg se réservant l’invention de la machine à écrire. Un siècle de grandes découvertes que clôture Christophe Colomb qui découvre l’Amérique en 1792.

Moins de poésie en géographie. On notera seulement la façade maritime Est, qui ouvre la France, et singulièrement Nantes, sur le Pacifique, carte à l’appui, et l’indispensable prouesse technologique que représente le canal sous la Manche, reliant Londres à Paris.

Plus vague, les axes nord-sud et est-ouest, bloqués par le centre, plus précis, on nous signale les chemins de fer classiques, les TGV et les pipelines, ce dernier type de chemin de fer étant exclusivement réservé au transport de marchandises.

Un beau néologisme enfin, l’adjectif fluviatile.

Je ne me moque pas, mais ceux qui ont écrit cela ont quand même quelques années de scolarité derrière eux et veulent être instituteurs. J’espère qu’aucun n’est passé par ma classe.

Pour finir, l’intégralité d’une copie. Il a voulu faire le malin celui-là… Le 18ième est aussi appelé siècle des Lumières, non pas grâce à l’invention de l’ampoule électrique (bcp plus tard) mais à la création d’un courant philosophique et littéraire, des auteurs comme Rimbaud, Verlaine ou Victor Hugo s’illustrant, ainsi que bien d’autres dans le patrimoine de notre culture.

Épilogue

Cette fois, ça y est, je suis français !
Un peu de seconde zone, malgré tout, puisqu’il est écrit sur ce papier “français, bien que né à l’étranger”…

Cela s’est fait très vite : le lundi après-midi, je me présente à l’accueil du tribunal, alors que tout le monde en sort, juges, avocats, secrétaires…
Ce n’est pas une alerte à la bombe, ni un exercice d’incendie. La France rend hommage ici aussi à Lazare Ponticelli, le dernier poilu de la grande guerre.
Une minute de silence et c’est torché. Tous retournent au travail, j’en profite pour me glisser dans le couloir.

La stagiaire est toujours a son bureau, toujours aussi stagiaire…

Dans le bureau voisin, la greffière est bien embêtée : j’ai un récépissé de remise de dossier, elle n’a pas le dossier. Je lui propose de laisser de nouveau les documents perdus, elle me promet de les transmettre sans délai. En sortant je croise le greffier en chef. Coup de fil dudit chef, le lendemain après-midi, le certificat est prêt.

La dame de l’accueil est épatée par la rapidité d’action du tribunal, très inhabituelle. Elle me conseille néanmoins de garder précieusement mon papier : le dossier qui va être archivé est dans une pochette rose. C’est la couleur des gens qui sont français par naturalisation, pour moi, c’est par filiation, donc il aurait fallu que ce soit une pochette jaune.

Si un jour je dois demander un nouveau certificat, ils ne pourront donc pas retrouver mon dossier.

Et non, on ne peut pas changer la couleur, il y a mon numéro de dossier écrit sur la pochette, cela ferait des complications. De toute façon, ils retrouveront peut-être un jour ma première demande, qui était dans une pochette jaune, j’en ai le récépissé.

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Petite conclusion en guise de clin d’œil :

La campagne électorale s’est terminée dans la joie et la bonne humeur, ici à Saint Leu.
Le maire sortant UMP, 19 ans de mandat, n’a rien vu venir. Il a été battu par un petit jeune de 31 ans, encarté au MODEM, allié au PCR et soutenu par le PS.
Il n’a pas lésiné sur les moyens.
C’est un homme de conviction, puisqu’il a voté au conseil général, où il est devenu conseiller Modem, pour la liste UMP, puis pour la présidente sortante UMP, elle-même soutenue par le PCR et le PS, laquelle a été élue contre la liste présentée par l’UMP, quelques conseillers UMP votant à gauche, ou à droite… je ne sais plus, c’est un peu compliqué.

Sa conclusion, sur RFO : “L’important, c’est que je sois dans la majorité.”

Quelques nouvelles du tribunal de Saint Pierre

Je ne vais rien dire du quotidien judiciaire local, qui n’est pas sans intérêt par ailleurs. On y va de l’ignoble, la mère de 77 ans violée par son fils, au plus léger, vente de photos nue d’une certaine Miss, le tout baignant généralement dans une misère sociale et une alcoolisation prononcée.
Non, pas de victime découpée au sabre, ni tuée à coup de bâton, juste un bout de vie du tribunal de grande instance de Saint-Pierre, jeudi matin.

On y entre maintenant sous un portique, sacs fouillés, monnaie et clés dans une boîte. Oublié le côté bon enfant de ma précédente visite, début octobre.
Dans le couloir, sur un banc, un mahorais, timide comme souvent, attend.
Il attend depuis huit heures une signature sur son certificat de nationalité. Le greffier doit arriver à onze heure me dit-il. On m’avait annoncé qu’il serait là à dix heures trente, dans un quart d’heure.

Sur le banc, devant nous, une jeune malbare et celle qui doit être son avocate. Il semble qu’elles soient là pour la levée d’une mesure de rétention, peut-être pour son homme? Elle sort un peu plus tard du bureau du juge, pas contente à entendre les éclats de voix. Le couple suivant passe, une jeune avocate chinoise, en robe cette fois-ci, et sa cliente.

Des secrétaires passent, discutent, se font la bise. On m’a déjà demandé ce que je voulais.

J’ai expliqué, ma demande de certificat de nationalité qui traîne, les papiers fournis, les coups de téléphone, mais il faut attendre le chef, un monsieur à cheveux blancs.
Il arrive à onze heure et quart, un vieux, traînant un ventre qui se répand, la chemise tendue sur le bas-ventre, couperosé, couvert de croûte sur la tête. Il entre dans son bureau, mais il ne faut pas le déranger, il discute. La secrétaire me rappelle qu’elle n’est que stagiaire et qu’il faut attendre.

Dans le couloir, c’est la cohue, une quinzaine de personnes, plus toutes jeunes, sont là, à attendre le juge, papotant en créole. On commente beaucoup l’affaire du jeune de quatorze ans qui a braqué une voiture sur le parking de l’hypermarché et qui s’est tué dix minutes plus tard, dans un virage, et ça hoche la tête en marmonnant.

Voilà la juge qui sort. On la dirait tout droit venue d’un film de Chabrol, avec ses talons aiguilles et sa coiffure tirée, jupe aux genoux et tailleur stylé. Elle fait l’appel, car c’est toute une fratrie qu’elle a convoquée, onze frères et sœurs, et la mère, une toute vieille, toute droite, toute mince qu’elle accompagne dans son bureau. Là il est question de la mise sous tutelle d’une personne absente, semble-t-il. Ils ressortent un moment plus tard, tous contents.

Moi, j’attends toujours, en bougonnant de plus en plus.
Une secrétaire, la dame du 31 (c’est son bureau) me fait entrer dans le bureau du chef, le numéro 35 et me fait réciter à nouveau mon problème – vous vous rappelez, le dossier de demande de certificat de nationalité, pour partir à la retraite bientôt –
J’avais déjà raconté la même histoire à la dame du bureau 34, une heure avant.

Je n’oublie pas le chef, qui est sorti de son bureau, parti discuter avec le président du tribunal. Il est passé devant nous sans un mot.

Mais on s’occupe de moi, enfin. La dame du 31, et la dame du 34 aussi. On me fait redire mon histoire, mais mon dossier fait de la résistance, il n’est ni dans la pile des dossiers traités, ni dans la pile des dossiers faits, ni dans celle des dossiers à rectifier, ni sur le bureau. Il me faut présenter mon justificatif de dépôt de dossier, que je ne lâche plus : elle vient, devant moi, d’égarer un document qu’elle devait faire signer mais en a retrouvé un autre, perdu il y a quinze jours.

Il est bientôt midi, cela circule beaucoup dans les couloirs, avocats, juges, secrétaires, c’est l’heure du repas.
Le chef se présente enfin, s’informe, se rappelle avoir entendu parler de mon dossier, avise le mahorais et dit à sa secrétaire : “Puisque M. B…. n’est pas encore parti, donnez-moi son certificat, je vais le signer.”
Il ajoute qu’il n’y a pas de problème pour moi, tous les papiers étant déposés. Il s’en va manger lui aussi, avec le bâtonnier justement.

Et me voilà avec la dame N°31 qui découvre l’affaire et la dame N°34 qui dit avoir déposé le dossier sur le bureau du chef il y a quelques mois. Elles s’affolent un peu, retournent les bureaux, en vain.

Nous partons nous aussi manger, mais à l’autre bout de la ville. Ma visite au tribunal n’aura pas été inutile, ma requête a bien progressé : j’ai déposé une demande de certificat de nationalité qui a été traitée, puis complétée, rectifiée et égarée.

J’en suis donc à l’étape suivante, la constitution d’une nouvelle demande.